Chartres :
Les bibliothécaires en colère !

Chartres Médiathèque Apostrophe 02-06-2018 Grève Tractage 2

Depuis plu­sieurs mois, les biblio­thé­caires et les agents de la Médiathèque de Chartres, l’Apostrophe, ont eu le temps de médi­ter sur la pro­po­si­tion de l’académicien Erik Orsenna, très média­ti­sée, d’ouverture le dimanche. En février der­nier, quand ils ont décou­vert que cette idée avait le vent en poupe à la Mairie, dont ils dépendent, ils ont espé­ré une concer­ta­tion, une consul­ta­tion des repré­sen­tants du per­son­nel, des sec­tions syn­di­cales. Mais ils constatent que l’autoritarisme a pré­va­lu. Les per­son­nels résument les déci­sions : 4 heures d’ouverture chaque dimanche après-midi, chaque agent concer­né le sera une semaine sur 5, des heures payées comme des heures sup­plé­men­taires, sans tenir compte de la spé­ci­fi­ci­té du dimanche, le volon­ta­riat n’a pas été envi­sa­gé, et la récu­pé­ra­tion serait pos­sible deux fois par an uniquement.

Aussi, same­di 2 juin, entre 16h et 17h, la grande majo­ri­té des 44 sala­riés a ces­sé le tra­vail à l’appel de l’intersyndicale (CFDT, CFE-CGC, CGT, FO) et de l’AG des per­son­nels. Ils ont dis­tri­bué un tract aux usa­gers pré­sents et aux pas­sants avec qui ils ont dis­cu­té une heure durant, devant les marches de la Médiathèque.

« Le der­nier bas­tion » de vie personnelle

Encadré Recul de 100 ans travail Dimanche

Un biblio­thé­caire fait remar­quer que la Médiathèque de Chartres est « une des biblio­thèques les plus ouvertes de France ». Le dimanche était le der­nier espace de vie pri­vée. Un autre pré­cise qu’ils tra­vaillent déjà 40 heures, same­dis inclus, chaque semaine, ce qui n’est pas le cas par­tout. D’autres confirment : tra­vailler aus­si le dimanche c’est les pri­ver de leur vie fami­liale. Une jeune femme ajoute que c’est pour elle le seul jour du week-end pour ren­con­trer ses amis qui ont eux-mêmes des horaires déca­lés. Il leur semble jus­ti­fié de défendre la vie fami­liale, asso­cia­tive, le vivre ensemble, le droit à la détente et aux acti­vi­tés personnelles.

« On nous a dit que c’était une évo­lu­tion de la socié­té, qu’il fal­lait s’adapter »

Travailler le dimanche est un retour en arrière pour tous les sala­riés. Devant les marches, l’exposé de cette situa­tion inter­pelle tous les audi­teurs. En effet, aucun sala­rié dans ce pays n’est plus à l’abri de ces choix de socié­té impo­sés par la logique consu­mé­riste et capi­ta­lis­tique dont la déré­gu­la­tion est l’instrument. Une touche de cultu­rel per­met de vali­der la logique com­mer­ciale domi­nante. Des biblio­thé­caires char­trains disent craindre que d’un dimanche toutes les cinq semaines on passe à deux, puis 3 et que le dimanche devienne un jour comme les autres. Et pour­quoi pas dans d’autres ser­vices muni­ci­paux dans la foulée !

Une rému­né­ra­tion scan­da­leu­se­ment insuffisante

La colère des employés de la Médiathèque concerne aus­si les emplois et la spé­ci­fi­ci­té de leurs pro­fes­sions. Ils notent que des per­son­nels ne sont pas rem­pla­cés depuis long­temps. Ils ont deman­dé si les départs en retraite atten­dus en 2019 le seront, sans avoir obte­nu de réponse de la Mairie. La qua­li­té du tra­vail les pré­oc­cupe : des étu­diants consti­tue­raient la moi­tié des effec­tifs du dimanche. Les agents seront sans doute char­gés de les for­mer alors que les effec­tifs sont déjà insuf­fi­sants. Un sala­rié fait remar­quer que depuis son ouver­ture en 2007, la biblio­thèque a per­du 10% de ses effec­tifs. Il y a eu des groupes de tra­vail, notam­ment sur la rému­né­ra­tion, mais la Mairie n’en a pas tenu compte. Les syn­di­cats savent que cette opé­ra­tion rece­vra une aide de l’Etat de 70% d’où leur éton­ne­ment devant autant d’intransigeance de la part de la Mairie. L’Intersyndicale a por­té toutes ces demandes explique Patrick, repré­sen­tant FO, elles ont été repoussées.

Quels sont les besoins ?

 Si la majo­ri­té des sala­riés ne contestent pas que l’accès à la Médiathèque puisse être offert aux habi­tants, ils s’étonnent que cette déci­sion ne soit pas appuyée sur une enquête en matière de besoins, en direc­tion des publics qui fré­quentent ce lieu ou qui sou­hai­te­raient le fré­quen­ter le dimanche. Serait aus­si néces­saire une étude des aspects maté­riels liés à l’accès à la Médiathèque plus dif­fi­cile le dimanche pour des per­sonnes éloi­gnées du centre-ville, et qui n’auraient pas de moyen de trans­port per­son­nel. Rien de tout cela n’a été étu­dié pensent plu­sieurs per­sonnes interrogées.

Cette action de débrayage aura des suites qui inté­res­se­ront éga­le­ment les sala­riés d’autres ser­vices et la popu­la­tion en général.