Conseil départemental
“Très loin, c’est tout près”
Le 21 décembre dernier le site cactus.press révélait que Claude Térouinard, président du Conseil départemental d’Eure-&-Loir, avait signé un bail de trois ans pour loger « pour nécessité absolue de service » son directeur général des services, XXX et sa famille. Mais loger où ? À Orléans ! La presse locale a attendu pour révéler l’affaire que Le Canard enchaîné la reprenne le 9 janvier sous le titre que nous avons copié : « Très loin, c’est tout près ». Gérard Leray, auteur des révélations de cactus.press, a déposé hier, 14 janvier, un recours au tribunal administratif pour faire annuler la délibération du Conseil départemental du 17 décembre.
Nous reproduisons ci-dessous les deux articles de Gérad Leray.
Note de la rédaction en date du 11 mai 2021
Nous avons reçu, de la part de la personne visée par les articles de cactus.press que nous avons reproduits sur cette page, une ”sollicitation droit à l’oubli” datée du 28 avril 2021.
Bien que nous ne sommes pas certains que ce droit à l’oubli soit applicable en l’occurrence où cette affaire concerne un personnel recruté par une collectivité publique et l’utilisation de l’argent public, nous avons néanmoins, dans un souci d’humanité qui est l’axe de nos engagements militants, de remplacer le nom de la personne concernée par ”XXX”.
L’affaire XXX
21 Décembre 2018, par Gérard Leray
Il était une fois Claude Térouinard, élu président (LR) du conseil départemental d’Eure-et-Loir le 17 octobre 2017 et investi le lendemain par ses 29 collègues d’une délégation de pouvoirs particulièrement riche… Sauf que dans l’histoire que Cactus va vous raconter, ledit président n’avait pas le droit de faire ce qu’il a fait.
Le 11 septembre 2018, le Président a signé un bail de trois ans devant notaire destiné à l’occupation de « Monsieur XXX, directeur général audit conseil départemental d’Eure-et-Loir, sa conjointe et ses enfants, pour son usage personnel. »
Jusqu’ici, rien d’anormal en apparence : un directeur général des services se doit d’être sur le pont et disponible en quasi permanence pour la collectivité. D’ailleurs, la concession de logement porte la mention « pour nécessité absolue de service ». Nous sommes rassurés. Mais il y a deux problèmes :
Le premier problème est que ce logement de fonction pour nécessité absolue de service (sic) se trouve rue d’Alsace-Lorraine à… Orléans, dans les beaux quartiers du coeur de ville, à proximité de la mairie, du conseil régional et du… tribunal administratif. Mais à 75 kilomètres du siège du conseil départemental sis à Chartres !!! Bonjour la disponibilité permanente, bonjour la facture énergétique du transport, bonjour le temps gaspillé avec l’argent des contribuables euréliens !
De surcroît, tout le monde sera ravi d’apprendre que la maison bourgeoise en question représente 150 mètres carrés pour un loyer mensuel de 1 800 euros (sans les charges), et que monsieur XXX y est installé depuis le début de l’automne.
Le second problème, évoqué en introduction, est que Claude Térouinard n’avait pas en septembre 2018 de délégation pour signer un tel bail… Il aurait dû s’appuyer sur une délibération préalable de l’assemblée départementale fixant la liste des emplois pouvant bénéficier du droit à être logé par nécessité absolue de service…
Du côté du président Térouinard, on avance que la loi a été respectée (sic), et que XXX n’habite finalement pas si loin de Chartres, qu’en une heure, il peut rallier la capitale de Beauce. Cactus met au défi quiconque de couvrir la distance Orléans-Chartres, de centre à centre, en une heure, tout en respectant les vitesses autorisées par le Code de la route.
L’opposition (de droite) montgolfiériste hurle (en silence) au scandale. Pour elle, l’illégalité est évidente. Pas question de soutenir l’insoutenable. C’est la raison pour laquelle les dames et sieurs Lefebvre, Hamelin, Henri, Honneur, de Souancé, de La Raudière, Minard, Lemare, Sourisseau, Lamirault, Le Dorven, Pecquenard, de Montgolfier et Puyenchet n’ont pas pris part au vote organisé par Térouinard lundi 17 décembre sur une délibération « déterminant la liste des emplois ouvrant droit à l’attribution d’un logement de fonction » (voir plus bas).
Évidemment, la majorité (de droite) pro-Gorges a voté « la confiance » à Térouinard : les dames Fromont, Baudet, Bracco, Breton, Aubijoux, Barrault, Dorange, les sieurs Lemoine, Martial, Billard, Guéret, Marie, Masselus.
Quant aux deux élus de « gauche », dame Lemaître-Lézin s’est courageusement abstenue, tandis que son compère Xavier Roux, définitivement à l’ouest, a offert sa voix à Térouinard.
La délibération doit encore passer sous les fourches caudines du contrôle de légalité préfectoral. La balle est donc dans le camp de la préfète Sophie Brocas. Par ailleurs, Cactus croit savoir que l’association Anticor…
Un recours contre la délibération “XXX”
14 Janvier 2019, par Gérard Leray
Heureux lecteurs de Cactus ! Vous êtes des privilégiés. En effet, il n’y a aucune chance que L’Écho républicain révèle l’information… Vous vous souvenez forcément du billet de Cactus publié le 21 décembre dernier sur l’affaire XXX. Et de l’article “seconde lame” du Canard enchaîné du 9 janvier 2019…
Aujourd’hui, j’ai adressé au tribunal administratif d’Orléans un recours pour excès de pouvoir afin d’obtenir l’annulation de la délibération « déterminant la liste des emplois ouvrant droit à l’attribution d’un logement de fonction » votée le 17 décembre 2018 par le conseil départemental d’Eure-et-Loir.
Cette délibération est illégale.
A l’origine, le président du Conseil Départemental a signé un bail de trois ans pour son directeur général des services dans une maison du centre-ville d’Orléans (!!!) arguant que ce logement de fonction est d’une nécessité absolue de service (!!!), à 75 kilomètres de son lieu de travail à Chartres.
Le loyer est gratuit pour le DG puisqu’il est payé intégralement par les contribuables euréliens (1800 euros sans les charges), et son transport quotidien d’Orléans à Chartres et retour mobilise voitures de fonction et chauffeurs, également à la charge des mêmes contribuables…
Les trente élus du conseil départemental ignorent-ils vraiment que la délibération est illégale ? Elle n’a été approuvée que par quinze d’entre eux, un s’est abstenu et les quatorze autres ont préféré ne pas participer au vote. Aucun (même pas les parlementaires de Montgolfier et La Raudière) n’a l’intention d’intenter un recours à l’identique du mien. Itou la préfète évidemment très au courant du dossier. Il faut que ce soit un simple citoyen qui fasse le boulot. C’est dire le triste état des garde-fous naturels de notre République.