Les J.O. ou l’amnésie climatique

Cet texte de Daniel Correia est extrait de la Lettre Écologie de Mediapart (lien en fin de texte).

Ci-des­sous un des­sin de Soph’ paru dans l’Humanité  ce même jour.

JO 2024, les premières médialles [dessin de Soph' dans L'Humanité]

C’est l’éléphant dans la pièce. À quelques jours de la céré­mo­nie d’ouverture des Jeux olym­piques et para­lym­piques (JOP) 2024, notre pla­nète vient de vivre sa jour­née la plus chaude jamais enre­gis­trée. Mais le lan­cer du mar­teau est plus impor­tant que la mon­tée des eaux tant la ques­tion cli­ma­tique semble absente de tous les dis­cours olympiques.

Difficile pour­tant de mettre le chaos cli­ma­tique sous le tapis pour cet évé­ne­ment spor­tif inter­na­tio­nal qui se déroule en majeure par­tie en plein air et au beau milieu de l’été.

Épisodes cani­cu­laires mul­ti­pliés par 3,3 depuis depuis le milieu du XXe siècle

Comme l’a récem­ment rap­pe­lé sur le réseau social X la cli­ma­to­logue et membre du Haut Conseil pour le cli­mat Valérie Masson-Delmotte : « Les jours de cani­cule, où la tem­pé­ra­ture maxi­male est supé­rieure à 30 °C, sont deve­nus […] 3,3 fois plus fré­quents (en cette période des Jeux olym­piques), par rap­port au milieu du XXe siècle. »

Impossible, aus­si, d’ignorer que depuis plus d’un an, chaque mois qui passe bat inexo­ra­ble­ment son propre record de tem­pé­ra­ture moyenne glo­bale même si cela ne se res­sent pas tant en France en ce mois de juillet, contrai­re­ment à nos voi­sins espa­gnols ou grecs. Ou que notre conti­nent euro­péen se réchauffe deux fois plus vite que le reste du globe.

Paris déjà très impac­té par le réchauffement

Pis, les com­pé­ti­tions spor­tives se déploie­ront sur un ter­ri­toire déjà très impac­té par la sur­chauffe pla­né­taire. Paris est la capi­tale euro­péenne au risque de sur­mor­ta­li­té le plus éle­vé en cas de vague de cha­leur. Selon une étude publiée en 2022 par l’Institut Paris Région, un tiers des Francilien·nes, soit 3,7 mil­lions de per­sonnes, sont considéré·es comme « très vul­né­rables » à la canicule.

20% de loge­ments sur­peu­plés en Seine-Saint-Denis

Et alors que les JOP entravent des accès à l’important hôpi­tal Delafontaine en Seine-Saint-Denis, ce dépar­te­ment, qui accueille le vil­lage olym­pique et plu­sieurs épreuves, compte envi­ron 20 % de loge­ments sur­peu­plés – condui­sant nombre d’habitant·es à vivre les tem­pé­ra­tures extrêmes sans aucun confort inté­rieur –, et a été par­mi les plus tou­chés lors de la vague de cha­leur de 2003, avec une sur­mor­ta­li­té de + 160 %.

Les JOP : 1,58 mil­lions de tonnes de CO2

Selon les chiffres offi­ciels, ces JOP lar­gue­ront dans l’atmosphère 1,58 mil­lion de tonnes de CO2, soit l’équivalent, en quelques semaines à peine, des émis­sions moyennes de plus de 150 000 Français·es sur une année entière. En réa­li­té, les orga­ni­sa­teurs ont bien du mal à éva­luer le bilan car­bone final de cette mani­fes­ta­tion. Les dépla­ce­ments des spec­ta­teurs inter­na­tio­naux pour­raient fina­le­ment être le double de ce qui a été pré­vu. Et la com­pen­sa­tion des émis­sions de ces Jeux n’a pu se réa­li­ser qu’en fai­sant appel à des pro­jets de séques­tra­tion du car­bone, de plus en plus contro­ver­sés dans les pays du Sud.

Non au JO d’hi­ver en 2030 en France !

Autant de faits qui démontrent l’absurdité éco­lo­gique d’organiser encore à la sauce XXe siècle ce type de méga-évè­ne­ment dans un monde qui brûle. Qu’on se ras­sure, Emmanuel Macron vient d’obtenir, sous condi­tions finan­cières, l’organisation des JO d’hiver de 2030 dans les Alpes fran­çaises. Un autre cas fla­grant d’amnésie cli­ma­tique : les trois quarts des trois cents sta­tions de ski du pays fer­me­ront d’ici à la fin du siècle, à cause du réchauf­fe­ment planétaire.

https://info.mediapart.fr/optiext/optiextension.dll?ID=LKHLWuVbf29U8M_t%2B%2BhfbFA9mOPslji5Pa1vqcXou1Ox9thjR814HCkFsWfNK3b2oDoQZXnrKnGimx%2BMTTqqmw1W6q