Projet de privatisation des RN 12 et 154
Où en est-on ? Questions à M.Trofleau (FEEL)

Dans le cadre de la mise en place de la Commission d’orientation des infra­struc­tures ins­tau­rée par le gou­ver­ne­ment de la nou­velle majo­ri­té issue des élec­tions du prin­temps der­nier, le pro­jet de mise en conces­sion auto­rou­tière pri­vée des RN 12 et 154 est en sus­pens. Nous avons sou­hai­té inter­ro­ger Martine Trofleau, pré­si­dente de la Fédération pour l’environnement en Eure-et-Loir (FEEL).

Martine Trofleau inter­viewée par France 3 le 18 novembre 2015

 

L’entretien s’est fait par cour­riels, les réponses ont été appor­tées le 6 novembre 2017.

ensemble.forum28.net : L’Écho a fait sa Une, le 4 novembre, sur un gel du pro­jet d’autoroute A154 se basant sur une réponse du cabi­net de la ministre des trans­ports, Élisabeth Borne, à un cour­rier du dépu­té Guillaume Kasbarian (LREM). Y a-t-il vrai­ment du nou­veau depuis la réponse du cabi­net de Nicolas Hulot à Saint-Prest-Environnement, le 22 août dernier ?

 

Martine Trofleau : On ne peut pas dire que la Une de l’Écho soit un scoop. À par­tir du moment où une nou­velle struc­ture (le Conseil d’Orientation des Infrastructure – COI), a été mise en place par le Président Macron pour hié­rar­chi­ser les pro­jets d’infrastructure, il nous parais­sait nor­mal que le pro­jet d’aménagement des RN154/12 soit à nou­veau sou­mis à l’analyse de cette struc­ture. En effet ce pro­jet des RN154/12, ins­crit sur la liste du SNIT (Schéma National des Infrastructures de Transport), avait été ana­ly­sé par la Commission « Mobilité 21 » en 2012/2013 et clas­sé comme pro­jet non urgent sauf pour le contour­ne­ment de St-Rémy-sur-Avre. Mais le Ministre des Transports Cuvilliers, sous la pres­sion des « grands élus » du Département et de la Région n’avait pas res­pec­té la déci­sion du 1er Ministre qui, sur ce dos­sier de la RN154/12, était en accord avec la Commission Mobilité 21 (jan­vier 2014).

Cette Commission Mobilité 21 devait hié­rar­chi­ser les pro­jets du SNIT en tenant compte des besoins des usa­gers des trans­ports quo­ti­diens et de l’amélioration des infra­struc­tures existantes.

Ce rap­pel sur cette Commission de 2012-2013 n’est pas inutile ; aujourd’hui, la com­mis­sion change de nom, mais la mis­sion est com­pa­rable, les exi­gences de hié­rar­chi­sa­tion sont iden­tiques et le pré­sident est le même… et nous pen­sons que le résul­tat ne peut être que le même.

Le pro­jet est donc gelé en atten­dant que la loi d’orientation sur les trans­ports soit pro­mul­guée à l’issue des Assises sur la Mobilité.

Opération fil­trage au rond-point des Propylées à Chartres, le 18 novembre 2015

 

ef28.net : Pouvez-vous nous pré­ci­ser le calen­drier offi­ciel des arbi­trages et déci­sions gouvernementales ?

 

M.T. : Vous savez que l’enquête publique s’est ter­mi­née le 10 jan­vier 2017. A par­tir de cette date, le gou­ver­ne­ment a 18 mois pour pro­non­cer la DUP (Déclaration d’Utilité Publique), ce qui nous mène au 10 juillet 2018. Là où ça se com­plique, c’est que le Commissaire enquê­teur (CE) dans son rap­port à la suite de l’enquête publique, a émis deux réserves dont la deuxième est pro­blé­ma­tique ; en effet  le Commissaire enquê­teur demande que le contour­ne­ment de Chartres ne se fasse pas par l’est, mais par l’ouest comme le pro­pose le pro­jet alter­na­tif MOB 28 (cf. les conclu­sions du CE).

Cette réserve si elle n’est pas « levée », c’est-à-dire réso­lue, alors l’avis « favo­rable » don­né par le CE, se trans­forme en avis « défa­vo­rable ». Il est vrai que le pro­blème est de taille car tech­ni­que­ment qua­si impos­sible à résoudre dans le cadre d’une mise en concession.

Reste donc que la DREAL[1] doit recon­si­dé­rer son pro­jet pour résoudre cette réserve (la 1ère réserve[2] ne pose pas de pro­blème pour être sou­le­vée, si ce n’est un coût sup­plé­men­taire…). Aujourd’hui en ce début novembre le tra­vail de la DREAL n’est pas encore fini.

Lorsque ce tra­vail sera fini, le dos­sier sera trans­mis au Ministère des trans­ports (en plein pen­dant la tenue des Assises de la Mobilité…) qui devra le trans­mettre, ensuite au Conseil d’État pour « Avis ». Le Conseil d’État dira si les réserves sont bien levées et si c’est le cas alors le Conseil d’État don­ne­ra un avis favo­rable pour que la DUP soit pro­non­cée. Si le Conseil d’État consi­dère que les ou une réserve n’est pas levée, alors il peut don­ner un avis « défa­vo­rable » à la DUP. 

Ensuite, et au 10 juillet 2018 au plus tard, le gou­ver­ne­ment pro­nonce (ou pas) la DUP. 

Depuis l’intense bataille menée lors de l’enquête d’utilité publique lan­cée il y aura un an à la fin de cette année, et gagnée avec 75  % d’avis défa­vo­rables, com­ment la Coordination des asso­cia­tions s’opposant à l’A154 et pro­mou­vant le pro­jet alter­na­tif MOB28 a-t-elle pour­sui­vi son action ?

Dès que l’enquête publique a été ter­mi­née - fin de la pro­cé­dure de « démo­cra­tie par­ti­ci­pa­tive » -, le col­lec­tif des Associations s’est mis dans la situa­tion anti­ci­pée où la DUP pour­rait être prononcée.

Nous avons choi­si un cabi­net d’avocat (Huglo-Lepage) qui nous a reçus mais qui ne com­men­ce­ra à tra­vailler que s’il y a DUP. Des groupes de tra­vail se sont mis en place par zones géo­gra­phiques et par thèmes pour four­nir à notre avo­cate le maxi­mum d’informations utiles dans notre démarche au Tribunal Administratif. 

Nous avons pré­sen­té à la nou­velle Préfète d’Eure-et-Loir notre posi­tion et l’alternative citoyenne (MOB 28) s’inscrivant dans le cadre de la tran­si­tion éco­lo­gique et soli­daire. Un ren­dez-vous est  en attente auprès du nou­veau Préfet de Région[3].

Nous avons inter­pel­lé les can­di­dats aux légis­la­tives qui ne s’étaient pas encore pro­non­cés sur cette pri­va­ti­sa­tion de notre bien com­mun que repré­sentent les Routes Nationales.

 

Affiche lors du ras­sem­ble­ment devant la pré­fec­ture le 17 novembre 2016

ef28.net : Si  la déci­sion gou­ver­ne­men­tale, après avis du Conseil d’orientation des infra­struc­tures, enté­ri­nait le pro­jet d’autoroute avec conces­sion au pri­vé, quels seraient les recours pos­sibles des oppo­sants et envi­sa­ge­riez-vous de nou­velles actions ?

 

M.T. : À tra­vers les réponses aux ques­tions qui pré­cèdent, je pense avoir répondu.

Le COI ne peut contre­dire la Commission Mobilité 21. Aujourd’hui, c’est la pres­sion poli­tique qui peut jouer comme en 2013/2014, mais  (même si la situa­tion est loin d’être satis­fai­sante glo­ba­le­ment), dans le dépar­te­ment la situa­tion poli­tique a un peu bou­gé. On doit l’exploiter et ins­truire notre jeune dépu­té de la 1ère cir­cons­crip­tion, l’histoire à ne pas reproduire.

En ce qui concerne les actions mili­tantes, des déci­sions seront prises en temps voulu.

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Les notes sont de la rédaction

1. Direction régio­nale de l’environnement, de l’aménagement et du logement.

2. Créer un échan­geur sup­plé­men­taire du côté de La Madeleine-de-Nonancourt.

3. Jean-Marc Falcone, nom­mé en août dernier.