Préaux-du-Perche, « Gilets Jaunes
et monde rural » : 120 participants !
À Préaux-du-Perche, proche de Nogent-le-Rotrou, la salle des fêtes était bien remplie. C’est bien au-delà des plus optimistes prévisions des organisateurs, puisqu’à écouter le gouvernement ou les médias, « les Gilets Jaunes, c’est fini »… C’est près de 120 personnes qui ont assisté à la rencontre organisée le 23 juin sur le thème “Mouvement des Gilets Jaunes et souffrance du monde rural”. Empêché par l’interruption des trains entre Rambouillet et Chartres, David Dufresne, qui recense les violences policières, n’a pas pu être au rendez-vous mais a promis de revenir bientôt dans le Perche.
Le débat fut intéressant et très libre.
Assaillis de difficultés
La soirée animée par Patrick Bard (écrivain et photojournaliste) a vu alterner de courts exposés par les invités, des témoignages de Gilets Jaunes de Nogent et des avis du public. La plupart des Gilets Jaunes du groupe nogentais font état de difficultés dans leurs vies d’origines variées : personnelles et familiales, des difficultés à se faire défendre contre des injustices, des moyens financiers réduits et des factures astronomiques, un travail sous-payé et précaire, des licenciements injustifiés, des craintes pour l’avenir, les transports coûteux, etc. D’autres ne se disent pas en difficulté mais soutiennent sans hésiter ce mouvement social inédit et courageux.
Alexandra Céalis (chercheuse) et Jean-Marc Salmon (sociologue) analysent le malaise agricole et rural et le sentiment d’abandon très répandu : santé, fermeture des services publics, des commerces, des usines ; métiers agricoles critiqués, contrôlés, isolement, poids de la famille, aides supprimées, emprunts bancaires, suprématie de la métropole voulue par le libéralisme. Les inégalités, les questions d’argent, le sentiment d’injustice s’expriment désormais à voix haute, « dynamique de groupe qui apporte une forme de soulagement » aux personnes en difficulté, analyse Alexandra Céalis. Jean-Marc Salmon rapproche ce mouvement « sans direction centrale » de la révolution tunisienne. Le mouvement est suivi de l’étranger, notamment en Algérie, explique-t-il.
Les mouvements syndicaux sur la défensive
Des agriculteurs interviennent, notamment des membres de la Confédération paysanne. Ils reconnaissent les difficultés décrites. Mais le porte-parole syndical départemental dit que le refus de désigner des représentants et les violences des manifestations ont été dissuasives pour beaucoup d’agriculteurs, tout en concédant que les Gilets Jaunes ont subi une violence d’État qu’il qualifie de « scandaleuse » et rapproche de celle que la Confédération subit parfois (Notre-Dame-des-Landes, ferme des 1000 Vaches).
Lors de la discussion se fait entendre une défiance à l’égard des syndicats qui n’ont pas favorisé le rapprochement des mouvements. Cependant, l’engagement personnel de syndiqués est incontestable. Une discussion sur les formes d’action évoque le blocage d’entreprises clés. La nécessité de converger est aussi affirmée, en particulier avec les lycéens dans leurs actions pour le climat, mais aussi avec les travailleurs des entreprises, les salariés en général. Une personne évoque la co-construction de solutions dans les instances plus officielles. Un membre du public choisit pour sa part une société sans privilèges donc sans argent.
Nombreuses revendications insatisfaites
Le mouvement est divers, il a fait reculer Emmanuel Macron et le gouvernement mais à la marge seulement, il reste une longue liste de revendications non satisfaites ! Au-delà des opinions de chacun(e) un sentiment est très partagé : le Mouvement des Gilets Jaunes est un mouvement très profond, de celles et ceux que l’on n’entend pas d’habitude… et qui, malgré les apparences, n’est pas prêt de s’arrêter.