Hébergement d’urgence :
la loi engage l’État… la volonté n’existe pas !

Une semaine après un pre­mier ras­sem­ble­ment avec tente devant la pré­fec­ture pour aler­ter sur le sort des per­sonnes à la rue sans solu­tion d’hébergement d’urgence, le col­lec­tif AERéSP28 a mis une nou­velle fois la pres­sion sur les auto­ri­tés pour que l’État res­pecte sa propre législation.

Dès avant qu’une délé­ga­tion soit reçue en pré­fec­ture, deux tentes avaient été ins­tal­lées devant l’entrée de la mai­son de l’État, le bar­num de Solidaires 28 (fort utile vu que la pluie s’est vite invi­tée), des tables avec des bois­sons à réchauf­fer grâce à un groupe élec­tro­gène et des ali­ments. On se pré­pa­rait à une longue attente. Et les dra­peaux d’organisations sou­te­nant le col­lec­tif étaient plan­tés dans les bacs à fleurs : FSU, PCF, Ensemble!…

 

Un ordre du jour char­gé pour la délé­ga­tion de l’AERéSP

 

Avant d’entrer, Julie Maurel, a pré­sen­té à la qua­ran­taine de per­sonnes mobi­li­sées1 les points sur les­quels la délé­ga­tion deman­de­rait les réponses des inter­lo­cu­teurs : accueil dégra­dé des étran­gers à la pré­fec­ture, aug­men­ta­tion des OQTF2 et convo­ca­tions déloyales  (OQTF signi­fiée alors que la per­sonne avait un RDV pour renou­ve­ler un titre de séjour), nou­velle pro­cé­dure de demande d’au­to­ri­sa­tion de tra­vail, régu­la­ri­sa­tions excep­tion­nelles par le tra­vail, cas des jeunes majeurs, pro­blème de l’ac­cès au cour­rier, chute libre des contrats ‘’jeunes majeurs’’ du dépar­te­ment pour les jeunes de l’ASE, inter­rup­tion illé­gale par le Département des prises en charge à 18 ans. Et bien-sûr, la ques­tion de l’ac­cès à l’hé­ber­ge­ment d’ur­gence (115).

Au bout de 45 minutes des infor­ma­tions com­mencent à fil­trer. La tam­bou­ri­nade s’interrompt. Micheline Cognard relaie que la Préfecture n’est pas repré­sen­tée par les chefs de ser­vice res­pon­sables des sujets trai­tés.  Le direc­teur de cabi­net de la Préfète, Monsieur Yannis Bouzar se plaint de ne pas avoir été pré­ve­nu des ques­tions en amont…, affir­ma­tion non fon­dée selon les membres de la délégation.

 

Premières infor­ma­tions peu rassurantes

 

Vers 18 h., Pierre Licout quitte la réunion et vient don­ner des pré­ci­sions « Les réponses qu’on a sont de deux ordres 1. ‘’Je ne sais pas mais je vais me ren­sei­gner et je revien­drai vers vous’’. 2. ‘’On ne peut pas rou­vrir des gui­chets à la pré­fec­ture car on n’a pas assez de per­son­nel…’’. Il y a aus­si un cer­tain déni de ce qu’on fait remon­ter : sur la ques­tion les délais on nous ren­voie à des sta­tis­tiques pro­duites par les ser­vices des étran­gers… qui ne cor­res­pondent abso­lu­ment pas à la situa­tion des per­sonnes qui sont accom­pa­gnées par le collectif. »

L’attente se pour­suit. On gri­gnote, on boit un café pour se réchauf­fer. Vers 18 h 45, la délé­ga­tion sort, Julie Maurel : « Monsieur Bouzar va contac­ter le ser­vice de la DDCSPP3 pour savoir pour­quoi les per­sonnes citées étaient sys­té­ma­ti­que­ment refu­sées par le 115 et reve­nir vers nous pour nous dire com­ment elles vont être héber­gées ce soir. » Une longue séquence s’engage alors faite de coups de télé­phone directs entre Céline Le Guay et le ‘’dir­cab’’ ou indi­rects par l’intermédiaire d’un agent du ren­sei­gne­ment ter­ri­to­rial sur place. La tam­bou­ri­nade reprend. Le ciel char­gé de nuages s’assombrit de plus en plus. On se res­taure pour de bon : chips, mini-piz­zas, cakes aux légumes… certain·e·s ont appor­té leurs sandwichs.

 

« Ce soir, il n’y a pas de place d’hébergement »

 

Au bout d’une heure et demie, le ren­sei­gne­ment ter­ri­to­rial trans­met : « Ce soir, il n’y a pas de place d’hébergement » pour les trois per­sonnes à la rue. Quel scoop ! Les manifestant·e·s présent·e·s s’adressent direc­te­ment à Monsieur Bouzar par sms et envi­sagent plu­sieurs actions : mani­fes­ta­tion devant l’Hôtel des Ligneris, cam­pe­ment sur la pelouse du FAC4, nou­veau ras­sem­ble­ment devant la pré­fec­ture dans les pro­chains jours. Voulant prendre au sérieux la parole de l’État qui s’engage pour le len­de­main, les vingt-cinq irré­duc­tibles lèvent le camp en déci­dant de suivre les choses ce jeu­di. Il est 21 h 30.

Cet épi­sode est carac­té­ris­tique de l’incroyable légè­re­té avec laquelle les ser­vices de l’État traitent les per­sonnes qu’ils ont pour mis­sion de pro­té­ger. Où est la consi­dé­ra­tion de l’humain quand on déve­loppe des argu­ties sta­tis­tiques ou qu’on se retranche der­rière un manque de moyens ? Et qu’en pensent les dépu­tés d’Eure-&-Loir, Messieurs Kasbarian, Vigier, Marleix et Lamirault qui sont au pre­mier chef res­pon­sables des déci­sions budgétaires ?

Nul doute que la lutte pour qu’aucune per­sonne ne reste à la rue doive se poursuivre.

_______

  1. En fai­sant le bilan de celles et ceux devant quit­ter le ras­sem­ble­ment et celles et ceux y arri­vant plus tard, c’est une soixan­taine de per­sonnes qui se sont mobi­li­sées ce mercredi.
  2. Obligation de quit­ter le ter­ri­toire français.
  3. Direction dépar­te­men­tale de la cohé­sion sociale et de la pro­tec­tion des populations.
  4. Foyer d’accueil chartrain.