Gilets Jaunes de Chartres : Emmanuel Gras a présenté ‘’Un peuple’’ au CinéParadis
L’Humanité du 23 février 2022 a publié un compte rendu de l’avant-première du film d’Emmanuel Gras, Un peuple, qui a suivi les Gilets Jaunes de Chartres pendant de longs mois. Nous reproduisons ici quelques extraits de ce papier. Merci l’Huma.
Chartres (Eure-et-Loir), Cécile Rousseau, envoyée spéciale.
”Je voulais montrer des personnes qui s’interrogent sur la citoyenneté”
«Une pulsion de vie ». « Un volcan en éruption ». Au cinéma les Enfants du Paradis, à Chartres (Eure-et-Loir), les métaphores fusent pour qualifier la lutte des gilets jaunes au cœur du film Un peuple, d’Emmanuel Gras. Ce dimanche après-midi, la projection en public de cette épopée née sur un rond-point menant à la cathédrale a vu converger les protagonistes du documentaire et les habitants. De novembre 2018 à mai 2019, le réalisateur a suivi, avec une caméra bienveillante, Nathalie, Agnès, Allan et Benoît dans leur révolte contre les inégalités. Si certains ont endossé la chasuble fluo pour dénoncer le prix de l’essence, d’autres avaient en tête la précarité de l’emploi ou encore le changement climatique. Loin des clichés médiatiques de « casseurs » ou de « cas sociaux », le cinéaste saisit cette appropriation de la chose politique entre débats et manifestations. « La figure du gilet jaune reste assez effrayante, glisse Emmanuel Gras, qui précise que son œuvre n’est pas militante. J’ai observé comment un mouvement s’auto-organise d’emblée à une échelle large et essaie de trouver des solutions créatives. Je voulais montrer des personnes qui s’interrogent sur la citoyenneté et leur façon de revendiquer, à un endroit qui n’avait pas vocation à devenir une agora populaire. […] »
”Je reste un gilet jaune comme les autres”
Dans la pénombre de la salle, l’appréhension est palpable. Nathalie, 55 ans, se demande comment va réagir sa belle-famille. Agnès, 47 ans, commence à être rodée des avant-premières, mais refuse tout net de devenir une icône du mouvement. « Je ne veux pas être une star. Je reste un gilet jaune comme les autres. J’aspire à l’anonymat ! » tranche-t-elle. Faute de passe sanitaire, certains de leurs compagnons de lutte n’ont pas pu assister à l’événement. En cette année électorale, cette immersion captivante axée sur la complexité des relations humaines et la soif de démocratie tombe à point nommé. Épine dans le pied du quinquennat, ce sursaut d’une population méprisée par un président de la République adepte des petites phrases comme « les gens qui réussissent et ceux qui ne sont rien », couvait depuis un moment. « Je me suis rendu compte à quel point les personnes s’étaient senties meurtries par ces propos, expose le réalisateur. Cela a nourri un sentiment d’humiliation et de colère. […]», précise celui qui a débarqué à Chartres après avoir suivi l’acte 1 puis 2 à Paris.
”Nous étions idéalistes et nous nous en sommes pris plein la gueule !”
Si Un peuple restitue le souffle combatif, les images de la répression policière inspirent encore des sueurs froides aux protagonistes, traumatisés par ces violences. […]Quant aux « cahiers de doléances » lancés en grande pompe par le pouvoir, ils ont aussi été remisés au rang des promesses non tenues. « Nous étions idéalistes et nous nous en sommes pris plein la gueule ! déplore Sylvie, gilet jaune. Si je suis sortie de chez moi, c’est parce que nous étions en train de perdre tous nos acquis. »[…] Cette fraternité entre travailleurs de tous horizons a bouleversé leur vie et aussi touché le public. « J’ai versé une larme », témoigne un spectateur.
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