À Chartres aussi, la marmite du mécontentement bouillonne

De midi à la fin d’après-midi, la CFDT et la CGT, avec le sou­tien des autres membres de l’Intersyndicale dépar­te­men­tale avaient ins­tal­lé leurs bar­nums devant le monu­ment Pasteur face à la Préfecture.  Il s’agissait, en ce jour de votes au Sénat et à l’Assemblée natio­nale sur le pro­jet scé­lé­rat des Retraites, de mon­trer au gou­ver­ne­ment et à Macron qu’elles ne ‘’lâchaient rien’’. À la pause de midi autour d’un sandw­hich, d’une bois­son et d’un café pré­pa­rés par les che­mi­nots CGT, les conver­sa­tions allaient bon train  sur com­ment orga­ni­ser la suite du mou­ve­ment alors qu’on venait d’apprendre que macro­nistes et LR réunis avaient voté la loi au Sénat.

Le 49.3 de trop

À 16 h. 30, l’ambiance était dif­fé­rente alors que la Première Ministre venait d’annoncer qu’elle uti­li­se­rait le 49.3 pour faire pas­ser la loi sans vote. L’indignation retom­bée, chacun·e essayait d’analyser cet évè­ne­ment : absence de majo­ri­té pour le pro­jet assu­ré­ment, crainte de cer­tains élus LR de devoir affron­ter leurs élec­teurs ? Tout le monde était d’accord pour diag­nos­ti­quer une sévère défaite de la Macronie virant à la crise de régime et un immense déni démo­cra­tique alors que les Français·e·s rejettent mas­si­ve­ment cette loi.

Au bout d’une heure, lorsque l’assistance se fut étof­fée, à l’initiative de Solidaires, une marche non décla­rée en Préfecture s’organisa pour aller mani­fes­ter devant la per­ma­nence du dépu­té Renaissance Kasbarian, bou­le­vard Maurice-Viollette. Non sans avoir aupa­ra­vant par­cou­ru l’hyper-centre de Chartres pré­cé­dée de poli­ciers fébriles. La ban­de­role de l’Intersyndicale, prise elle aus­si de cours, fut déployée durant le parcours.

Kasbarian… ouh ouh ouh !”

Le cor­tège, obser­vé avec sym­pa­thie par bien des Chartrain·e·s quit­tant leur tra­vail, avait peu à peu gros­si pour atteindre 150 per­sonnes… qu’attendait un cor­don de 7 poli­ciers natio­naux casque en ban­dou­lière dont cer­tains avec bou­clier, devant une per­ma­nence volets fer­més1. La petite foule mas­sée là pen­dant un quart d’heure a lais­sé écla­ter sa colère : ‘’Déni de la démo­cra­tie ouh ouh ouh !’’, ‘’Le 49.3 on n’en veut pas !’’, ‘’Les 64 ans on n’en veut pas !’’

Puis, l’idée vint d’aller rendre visite à la rési­dence offi­cielle de la Préfète. Logiquement car cette rési­dence fut celle de Jean Moulin, le pre­mier pré­sident du Conseil National de la Résistance dont une des décli­nai­sons du pro­gramme fut la  sécu­ri­té sociale avec, notam­ment, l’instauration du régime de retraites par répartition.

La Préfecture de Jean Moulin inaccessible

Mais, à l’entrée de la rue Colin‑d’Harleville, des poli­ciers, plus nom­breux, casques à visière bais­sée et bou­cliers trans­lu­cides en main, bar­raient fer­me­ment la voie. Un groupe de manifestant·e·s, fai­sant détour par la rue Sainte-Foy, réus­sit à s’introduire entre deux cor­dons de poli­ciers. Il y eut quelques légers ‘’frot­te­ments’’ mais tout res­ta plu­tôt soft, le but étant de crier son indi­gna­tion le plus près pos­sible des fenêtres pré­fec­to­rales. Ce qui fut bruyam­ment fait !

Cette fin d’après-midi char­traine, à l’instar de beau­coup d’autres villes de France, aura mon­tré au pou­voir que la mar­mite du mécon­ten­te­ment bouillonne et qu’il serait irres­pon­sable s’il conti­nuait à jouer avec le feu et vou­lait impo­ser une réforme hon­nie des citoyen·ne·s.

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  1. Depuis le début du mou­ve­ment social, le dépu­té a dras­ti­que­ment réduit sa com. Plus de belles affiches sédui­santes sur les vitres, ni de por­trait du sym­pa­thique homme à la cas­quette pro­lé­taire. Aurait-il démé­na­gé sans lais­ser d’adresse ?