Catalogne : une crise majeure et durable
Après un court moment de désarroi suite à l’application du 155 et de l’impréparation à la gravité de cette situation, le mouvement social catalan a montré sa force à l’occasion de la grève du 8 novembre et de la manifestation à Barcelone le 11 novembre. La grève du 8 a surtout été l’occasion d’une forte mobilisation des Comités de Défense de la République (CDR). Ce mouvement d’auto-organisation venant des différents quartiers, villages ou villes a pu bloquer les principales routes et avenues au cours de la journée. La manifestation du 11 novembre a été à la hauteur des « Diadas » de ces dernières années avec, selon la police 750 000 manifestant-es solidaires des emprisonnés politiques. Ces deux initiatives sont un succès du mouvement citoyen en lutte pour défendre ses droits.
L’ensemble des organisations politiques ont finalement décidé de se présenter aux élections du 21 Décembre, élections imposées par le gouvernement du PP suite à la dissolution du parlement catalan.
Les forces indépendantistes vont se présenter chacune de leur côté avec des listes ouvertes. Le PDCat et ERC ont donc décidé de ne pas renouveler la liste commune « Junts per el si » de 2015. La CUP vient de se décider de se présenter malgré tout à ces élections « illégitimes ». Catalunya en Comu s’y présentera aussi.
Le pronostic le plus probable, si nous suivons les différents sondages, devrait donner un résultat assez proche du Parlement actuel. Ces sondages indiquent une possibilité pour les courants indépendantistes d’obtenir une courte majorité mais ils indiquent aussi, si ce n’était pas le cas, une majorité quand même pour le camp « pour le droit à décider » (PDCat, ERC, CUP, Catalunya en Comu). Si ces sondages se confirment dans les urnes, c’est une défaite pour le gouvernement PP et Rajoy dont le pari est un retournement de situation favorable au bloc PP, Ciudadanos, PSC (Parti Socialiste de Catalogne.)
Il serait illusoire de croire que Rajoy et son gouvernement vont enregistrer le résultat de l’élection dans un nouvel état d’esprit. De nombreux dirigeants du PP ont déjà indiqué que si les forces indépendantistes gagnaient, il faudrait maintenir l’application du 155. Il en va de même pour les prisonniers politiques. Emprisonnés sans jugement, avec des demandes de peine allant de 15 à 30 ans, l’idée d’une amnistie après l’élection n’est pas d’actualité pour Rajoy et son gouvernement.
L’Union Européenne vient de montrer, à nouveau, son soutien à un régime autoritaire plutôt qu’aux droits démocratiques d’un peuple. Néolibéralisme et autoritarisme font bon ménage pour interdire au peuple catalan de simplement décider de son avenir. Macron et son gouvernement se sont mis au diapason du soutien au régime espagnol.
Nous constatons que les processus démocratiques, l’expression des citoyen-es comme par exemple lors d’un referendum se trouvent à devoir faire face non seulement à leurs gouvernements mais aussi à la dérive autoritaire de l’UE. Cela rend indispensable de construire la solidarité avec la Catalogne dans le cadre de la défense de la démocratie et des droits des citoyens en Europe.
Nous sommes dans une crise majeure et durable. Un potentiel de mobilisation énorme existe, une expérience forte d’auto-organisation, une désobéissance massive s’exprime. L’enjeu est maintenant de dénouer la question nationale en construisant un processus constituant par en bas et par en haut. Un processus constituant liant les questions démocratiques, et la question sociale pour porter le projet de République Catalane qui est la forme choisie par le peuple catalan pour exercer son droit à l’autodétermination.
Le 17 novembre 2017. L’équipe d’animation nationale d’Ensemble!