Le président du Conseil départemental
encourage le rejet xénophobe

2015 Affiche électorale Térouinard Départementales Brou

Affiche élec­to­rale de C.Térouinard lors des dépar­te­men­tales de 2015

Dans le dépar­te­ment comme au niveau natio­nal, cer­taines forces poli­tiques vou­draient faire des « migrants », un enjeu majeur des futures élec­tions euro­péennes. Les mêmes défendent un sys­tème éco­no­mique qui veut avant tout péren­ni­ser la cir­cu­la­tion pla­né­taire des mar­chan­dises et de la finance au détri­ment des droits de tous les êtres humains.

Que des habi­tants des pays pauvres ou appau­vris par les guerres, le réchauf­fe­ment cli­ma­tique, les accords com­mer­ciaux inter­na­tio­naux ou par des régimes cor­rom­pus cherchent un ave­nir meilleur en Europe, voi­là qui auto­rise nos diri­geants à crier à l’invasion. En l’occurrence les lec­teurs de l’Écho répu­bli­cain du 22 sep­tembre der­nier ont eu confir­ma­tion des pen­sées pro­fondes de M. Térouinard, Président du Conseil dépar­te­men­tal, au sujet des mineurs étran­gers non accom­pa­gnés (MNA). À la ques­tion « Comment expli­quez-vous la mon­tée des par­tis natio­na­listes », il répond en quatre mots : « La crise des migrants ». Non pas l’accentuation de la pré­ca­ri­té de l’emploi, la des­truc­tion des pro­tec­tions sociales, la défiance à l’égard de l’Union euro­péenne… Non, une seule expli­ca­tion : « les migrants » !

Les mineurs iso­lés étran­gers sont avant tout des enfants !

13 juin 2018 : Rassemblement devant l’ASE à Chartres pour un accueil digne des mineurs isolés

La réponse sui­vante nous per­met de com­prendre quels migrants doivent être éva­cués le plus tôt pos­sible du dépar­te­ment : les mineurs iso­lés. « Ce n’est pas notre bou­lot [de les accueillir] » affirme le Président. Depuis les textes de 2016, une clé de répar­ti­tion natio­nale entre les dépar­te­ments a été mise en place. Selon la loi, ces jeunes ne sont pas sou­mis aux règles de séjour des étran­gers, ils relèvent de la pro­tec­tion de l’enfance qui est de la res­pon­sa­bi­li­té dépar­te­men­tale. Renvoyer ces jeunes à une ges­tion par l’État, parce qu’ils sont étran­gers, est une pro­po­si­tion dis­cri­mi­na­toire inac­cep­table aux yeux de la loi (article 225–1 du Code pénal).

En Eure-et-Loir comme ailleurs, les asso­cia­tions veillent à ce que ces jeunes ne soient pas héber­gés dans des condi­tions indignes comme ce fut le cas dans un hôtel char­train, ou à la rue. Cet été des jeunes erraient sous la cani­cule et dor­maient dehors dans Chartres. Sans état d’âme, le Conseil dépar­te­men­tal attri­bue aux MNA une somme très infé­rieure à celle des­ti­née aux jeunes en Maisons d’enfants à carac­tère social : 58,42 € par jeune et par jour pour un MNA, 189,45 € pour un jeune en mai­son d’enfants à carac­tère social selon le direc­teur de l’ADSEA28 (1) (L’Écho du 19-07-2018).

Ces jeunes, qui ont fui leur pays, par­fois per­du leurs parents, qui, presque tous, ont ris­qué la mort dans le désert, en Libye, en Méditerranée, mani­festent leur sou­la­ge­ment et leurs espoirs en arri­vant en France. Comment peut-on froi­de­ment les pri­ver d’une assis­tance maté­rielle et psy­cho­lo­gique, mettre sou­vent en doute leur récit de vie, leurs docu­ments d’identité, être indif­fé­rent à leur sort quand ils ont dépo­sé un recours pour prou­ver leur mino­ri­té et que l’ASE (2) les ren­voie à la rue pour des mois, ou quand ils atteignent leurs 18 ans ? Pourquoi les mineurs étran­gers doivent-ils subir des exa­mens osseux alors que ceux-ci ont été contes­tés par le Haut Conseil de la Santé publique en 2014 et condam­nés par le Défenseur des droits en 2016 comme « inadap­tés, inef­fi­caces et indignes » ?

Rassemblement devant le Conseil-départemental Chartres 04-07-2018 Dignité Mineurs isolés étrangers

4 juillet 2018 : Rassemblement devant le Conseil dépar­te­men­tal à Chartres pour un accueil digne des mineurs isolés

Il ne fait aucun doute que les capa­ci­tés d’accueil des dépar­te­ments, peu sou­te­nus par l’État, sont insuf­fi­santes. Selon un récent rap­port de la Cour des Comptes, l’augmentation de cer­taines dépenses sociales est réelle mais elle concerne le RSA, à cause de la pré­ca­ri­té, les aides aux per­sonnes han­di­ca­pées et aux per­sonnes âgées, mais bien peu l’aide sociale à l’enfance.

Une atti­tude poli­ti­cienne dangereuse

Les col­lec­tifs de défense du dépar­te­ment, sont mobi­li­sés pour aider les plus vul­né­rables, expli­quer ce qui est volon­tai­re­ment sous­trait au débat public, dénon­cer les carences du Département et de l’État qui comptent sur le béné­vo­lat. Ils doivent aus­si faire savoir que, contrai­re­ment aux rumeurs que les auto­ri­tés laissent cou­rir, le nombre des entrées dans notre pays a décru de 60% en 2017 (3), le droit d’asile est très limi­té, et les condi­tions de régu­la­ri­sa­tion sont encore dur­cies par la loi sur les étran­gers votée cet été.

Dans cette inter­view, dont la visée poli­tique est assu­mée, le pré­sident du Conseil dépar­te­men­tal explique que L.Wauquiez, pré­sident de L.R. « essaie de rame­ner au ber­cail des anciens de chez nous pas­sés au FN ». Au lieu de four­nir des don­nées éta­blies qui montrent que les peurs sont infon­dées, M. Térouinard encou­rage le rejet xénophobe !

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  1. Association dépar­te­men­tale pour la sau­ve­garde de l’enfant à l’adulte d’Eure-&-Loir.
  2. Aide Sociale à l’Enfance, ser­vice du Conseil dépar­te­men­tal dont la mis­sion est de venir en aide aux enfants et à leur famille par des actions de pré­ven­tion indi­vi­duelle ou col­lec­tive, de pro­tec­tion et de lutte contre la maltraitance.
  3. Plus des trois quarts des réfu­giés s’installent dans des pays du Tiers Monde, chez leurs voi­sins et non en Europe.