Soutien aux exilés en Eure-&-Loir
Une soirée combative et solidaire
Samedi 10 novembre, les deux collectifs d’aide aux migrants, réfugiés et sans-papiers, militant notamment sur Chartres, ont fusionné en un seul : Accueil des Exilés et Régularisation des Sans-Papiers (AERéSP). [Nous reviendrons sur cette fusion dans un prochain article] Les activités en faveur des exilés quels qu’ils soient vont évidemment se poursuivre car la politique migratoire en France et en Europe, donc la situation des migrants ou des personnes sans-papiers en Eure-et-Loir ne se sont pas améliorées.
C’est ce que Josie Boucher, présidente adjointe de la FASTI (1) est venue expliquer devant un auditoire attentif et grave d’une bonne soixantaine de personnes. La question centrale des droits des personnes étrangères a permis de rappeler que le cadre international offre théoriquement une protection aux êtres humains contraints à migrer ou le souhaitant pour des motifs divers. Mais la réalité est toute autre : depuis les années 2000, il y a un durcissement qualitatif affirme Josie Boucher avec le but avoué de décourager les demandeurs d’asile. Elle insiste sur les lois successives, dont la dernière loi de 2018 Asile et Immigration, consistant à enfermer plus longtemps, élargir les motifs de « soupçon de fuite », faciliter la délation, expulser plus rapidement et interdire le retour.
Plusieurs situations ont été exposées par J. Boucher, notamment :
- la procédure Dublin qui concerne 30% des demandeurs d’asile ;
- le temps accordé pour demander l’asile qui passe de 120 jours à 90 jours
- le passage à la régionalisation de la gestion des demandeurs par la seule Préfecture de région, qui se met en place depuis le 1er novembre, risque de permettre des regroupements qui éloigneront les demandeurs étrangers des solidarités citoyennes.
Le traitement des mineurs isolés a été évoqué, tout particulièrement, les tests osseux, « une barbarie incroyable ». Les jeunes, dont les papiers et l’âge sont contestés par les services d’Aide sociale à l’Enfance, sont de plus en plus souvent à la rue, sans encadrement éducatif, sans soins. Pratique systématique dans certaines grandes villes. L’intervenante dénonce : « La question de protection de l’enfance passe après le fait que ce sont des étrangers à expulser ».
L’article de loi que les militants appellent « délit de solidarité », date de 1938. Jusqu’aux années 70 il visait essentiellement les passeurs qui tiraient bénéfice des passages des migrants. Aujourd’hui il cherche toujours à « intimider la solidarité » malgré quelques aménagements comme le droit au transport de sans-papiers en véhicule.
D’autres lieux d’accueil en Eure-et-Loir
Un débat a suivi ainsi que des témoignages de migrants et de personnes qui demandent une régularisation ou s’inquiètent au sujet de la rétention ou des délais d’expulsion. Puis une présentation des situations euréliennes : des membres du CRSP28 ont expliqué le rôle des permanences qu’ils assurent afin d’aider les personnes dans leurs démarches, des personnes souvent en « grande souffrance » mais pleines de courage. Tâche souvent compliquée par une législation complexe et mouvante et par des demandes de l’administration parfois injustifiées. Une militante rappelle que le collectif souhaite faire changer les lois parce que ce sont « les lois qui fabriquent les sans-papiers ».
Puis ont été présentées rapidement les situations de Nogent-le-Rotrou et de La Loupe où sont accueillies, depuis l’été, des familles syriennes, soudanaises et d’Europe de l’Est. À Nogent-le-Rotrou, les nombreuses personnes qui se sont engagées pratiquent l’accueil dès l’arrivée des familles dans des logements du parc social : dons matériels, aides diverses pour qu’elles deviennent autonomes dans la ville, activités de détente ou culturelles ou sportives partagées avec la population locale. Dans les deux villes, des volontaires ont choisi de fournir des cours de Français langue seconde et certain.e.s de se former à cet enseignement spécifique. Les intervenants ont noté la grande richesse humaine qui caractérise les contacts établis, tout en faisant remarquer que l’État, la Préfecture et les organismes de gestion ne peuvent se passer des interventions des bénévoles du fait de dotations financières et en personnels manifestement insuffisantes.
Les discussions se sont poursuivies autour d’un repas partagé entre les militants et un bon nombre des invités. Ce soir-là, de nouvelles personnes ont inscrit leur nom sur les listes du Collectif ou celui de leur organisation. Le nouveau collectif AERéSP28 a prouvé son utilité et s’apprête à poursuivre son action militante à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’enfant du 20 novembre, notamment pour les mineurs isolés étrangers dont le traitement à Chartres est préoccupant.
_________
- La FASTI : Fédération des Association de Solidarité avec tous les Immigrés