Les revenus paysans victimes
des accords de libre-échange

Navire frigorifiqueChili, Brésil, Paraguay, Argentine , Uruguay (pays du Mercosur1), Mexique, Nouvelle-Zélande, Australie, Inde, Kenya, Indonésie… figurent par­mi les prin­ci­paux futurs accords de libre-échange de l’Union européenne.

Comment expli­quer un tel embal­le­ment ? Maxime Combes, coor­di­na­teur du col­lec­tif Stop Ceta/Mercosur explique : ‘’Signer de nou­veaux accords per­met à l’UE d’imaginer pou­voir riva­li­ser avec les États-Unis et la Chine sur le plan géo­po­li­tique, tout en espé­rant res­ter dans la course mon­diale à l’accès aux matières pre­mières, notam­ment celles jugées clés pour le ver­dis­se­ment de l’économie.’’

Les reven­di­ca­tions de la Confédération pay­sanne

Libre échange Confédération paysanne [visuel]La Confédération pay­sanne, quant à elle, reven­dique ‘’des poli­tiques publiques qui pro­tègent, maî­trisent, régulent, inter­viennent et répar­tissent. Nous ne man­quons pas de pro­po­si­tions, affirme-t-elle, que ce soit au niveau fran­çais, euro­péen ou mon­dial : inter­dic­tion de la spé­cu­la­tion sur les pro­duits ali­men­taires dans l’ensemble des mar­chés mon­diaux, tun­nels de prix et prix mini­mum d’entrée au niveau euro­péen, inter­dic­tion pour nos ache­teurs de négo­cier des prix sous nos coûts de pro­duc­tion, et inter­dic­tion des sur­marges réa­li­sées par la grande dis­tri­bu­tion au niveau français.’’

L’accord UE-Nouvelle-Zélande signé sans débat par­le­men­taire en France !

Le 22 novembre 2023, 83 % des dépu­tés euro­péens (524 sur 630 votants) ont approu­vé la rati­fi­ca­tion de l’accord de libé­ra­li­sa­tion du com­merce UE-Nouvelle-Zélande, avec le sou­tien de la France. Il devrait entrer en vigueur au prin­temps 2024.

Il n’y a jamais eu de débat au sein du Parlement fran­çais alors que, lors du vote au Parlement euro­péen, une majo­ri­té d’eurodéputé·e·s français·e·s (43 contre 20) a voté contre la rati­fi­ca­tion de cet accord.

L’accord UE-Mercosur

Élevage bovin en PercheL’agroéconomiste Baptiste Buczinski, coau­teur d’une étude concer­nant les effets de l’accord UE-Mercosur, conclu en 2019 mais pas encore rati­fié, estime que les impor­ta­tions de bœuf – qui devraient pas­ser de + 23 % à + 52 % d’ici 2030 – peuvent déstruc­tu­rer la filière en France. ‘’Le Mercosur est l’accord de libre-échange où la conces­sion sur la viande bovine sera la plus grande. La qua­si-exclu­si­vi­té de ce contin­gent de 99 000 tonnes sera rem­plie par de l’aloyau, une par­tie de l’animal qui regroupe tout un tas de pièces nobles (filet, faux-filet, entre­côte, bavette…). C’est le seg­ment qui rap­porte le plus de valo­ri­sa­tion sur le mar­ché euro­péen. Ouvrir à de l’import pour ce type de pièce noble, à des pays struc­tu­rel­le­ment plus com­pé­ti­tifs, revient à mena­cer les reve­nus des pro­duc­trices et pro­duc­teurs de bétail de l’UE. Surtout, le Mercosur est un accord par­mi d’autres. Si on ajoute le Ceta avec le Canada, l’accord avec la Nouvelle-Zélande qui vient d’être rati­fié, celui avec l’Australie en cours de négo­cia­tion, l’Inde (4e plus gros expor­ta­teur mon­dial et plus gros chep­tel du monde)… la mul­ti­pli­ci­té des accords est problématique.’’

Les négo­cia­tions UE-Mercosur ont repris début octobre 2023

Labours en PercheLa Confédération pay­sanne met en garde : ‘’Ni les par­le­men­taires, ni l’opinion publique ne sont dûment infor­més de leur conte­nu. Cet accord crée­rait la plus grande zone de libre-échange de la pla­nète avec un quart du PIB mon­dial et 720 mil­lions de per­sonnes.’’ Emmanuel Macron avait expri­mé, à plu­sieurs reprises depuis 2019, un ‘’non en l’état’’. Mais en juin 2023 au Brésil, Olivier Becht, le ministre fran­çais du Commerce avait indi­qué vou­loir se ‘’don­ner du temps’’ pour ‘’évi­dem­ment conclure’’ cet accord.

Plusieurs par­le­ments natio­naux et régio­naux, ain­si que le Parlement euro­péen lui-même, ont pris expli­ci­te­ment posi­tion contre l’accord UE-Mercosur. Où en est la France ? Actuellement Emmanuel Macron dit ne pas vou­loir signer mais les négo­cia­tions ne sont pas interrompues !

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  1. Marché com­mun du Sud.