Chartres : De place en place pour faire connaître
la lutte des précaires de l’emploi
C’est par une répétition de la chanson d’invention locale ‘’Résister c’est créer, créer c’est résister’’ qu’a débuté la nouvelle ‘’action artistique et citoyenne’’ à Chartres ce 10 avril (une précédente avait eu lieu le 13 mars et un autre la veille à Dreux). Il y a là, devant le monument Jean Moulin, une quarantaine d’intermittent·te·s et de soutiens. Après avoir accordé leurs instruments et ajusté leurs masques noirs, les artistes occupant l’Atelier à spectacle de Vernouillet ont entamé une déambulation avec pantomimes, musique, chansons et proclamations.
‘’Qu’est-ce qui se passe ?’’
Premier arrêt sur la place des Épars devant les étals de légumes du marché, déplacé pour cause de pandémie, où la chanson est reprise par des badauds venus faire leurs courses : ‘’Prolongation de l’année blanche / Pour tous les précaires de toutes les branches…’’. Une fillette interroge sa maman : ‘’Qu’est-ce qui se passe ?’’
Le cortège musical s’engage ensuite sur le boulevard Chasles où le marché a égrené ses baraques. Des tracts sont proposés aux passants croisés. Vite, les porteuses de la banderole ‘’Atelier à spectacle occupé’’ grimpent sur les marches du théâtre pour la photo. À l’angle de la rue Mathurin-Régnier, premier die-in pour dénoncer les conséquences mortifères du confinement des lieux culturels.
‘’Une réforme indigne’’
À l’arrivée sur la place des Halles, au milieu des guérites des commerces de bouche, c’est près d’une centaine de personnes qui se mettent en cercle en vue de l’agora. Mais d’abord, un impressionnant die-in (tous les artistes sont en noir et des soutiens se joignent) donne le ton. Une intermittente explique ‘’Le covid a changé nos vie. Il a précipité notamment des centaines de milliers d’entre nous dans l’incapacité de travailler et de vivre’’. Elle explique que depuis le début mars des dizaines de théâtres sont occupés, et aussi en Italie et en Belgique, par des ‘’salariés intermittents de l’emploi […] aussi des étudiant·e·s, des précaires, des chômeuses et des chômeurs […] on y parle de nos vies, de nos luttes, de nos colères, de nos rêves et ça fait du bien’’. Elle rappelle l’exigence de l’abandon de la réforme de l’assurance chômage : ‘’Cette réforme est inacceptable, indigne, obscène. Elle va appauvrir de façon écrasante les plus précaires.’’
‘’Elles font du lien, ces dames-là’’
Avant d’autres prises de parole, une respiration voluptueuse sur la chanson ‘’Danser encore’’ de HK. Puis Anthony, chanteur et danseur de claquettes, se dit très heureux d’être là, il vient de découvrir par le journal l’action du collectif et souhaite que ça puisse ‘’durer sur le long terme’’. Comme à Dreux, une comédienne rappelle la situation indigne (salaires, conditions de travail) des auxiliaires de vie sociale (AVS) qui mériteraient un statut. ‘’Elles font du lien, ces dames-là’’.
Imperceptiblement, les musiciens entament l’air de Bella Ciao, la chanson des partisans italiens, qui est bientôt reprise par la foule, comme un symbole de la persistance des luttes émancipatrices à travers le temps.