« Comme un espoir mis en chantier »
Tribune de ”Chartres à gauche”
Dans le magazine municipal ”Votre Ville” de mai 2021, Jacqueline Marre et Boris Provost, élus de la liste ”Chartres à gauche” évoquent la modernité politique des réalisations et projets de la Commune de Paris de 1871.
Pour lire notre courte biographie de Gustave Maroteau, cliquez ici.
Écouter “La Commune” de Jean Ferrat
Le chapô, l’illustration et la chanson ont été choisis par la rédaction.
« Comme un espoir mis en chantier » ( Jean Ferrat)
Il y a 150 ans, à Paris, des insurgés refusent la capitulation du gouvernement républicain de Thiers devant l’Allemagne et se constituent en gouvernement populaire. « La Commune » est née. En trois mois, du 18 mars au 28 mai 1871, des ouvriers, des artisans, des petits commerçants, des employés, des instituteurs, des professeurs, des journalistes et des artistes ont voté des décrets révolutionnaires, pas nécessairement appliqués faute de temps.
Pourquoi en parler ici ? C’est si lointain, et ce n’est pas notre ville ! Pourtant beaucoup de notre héritage social et démocratique est redevable à la Commune, même s’il a fallu, et s’il faudra, de nombreux autres combats pour le concrétiser. En effet, elle a mis en chantier la séparation de l’Église et de l’État, l’école laïque et gratuite, les crèches, les cantines dans les écoles, la reconnaissance de la famille hors mariage, la réquisition des logements vacants, la citoyenneté donnée aux étrangers, la vaccination gratuite (contre l’épidémie de variole,), l’égalité de salaire entre instituteurs et institutrices, et même la décentralisation : les communes seront autogérées avec un budget municipal, l’intervention des citoyens sera permanente. Le Manifeste du 27 Mars 1871 écrit :« la fédération de toutes les communes augmente, par la réciprocité, la force, la richesse […] de chacune d’elles, en la faisant profiter des efforts de toutes». Notre agglo en hérite. Qui l’aurait cru ?
Mais de quelle façon ? Concentrer les pouvoirs de la ville et de l’agglomération dans les mains des mêmes personnes, ‑le Maire de Chartres est le Président de l’agglo, des adjoints sont vice-présidents- est-ce construire une véritable communauté de communes ? Mutualiser les moyens en diminuant le nombre d’agents, est-ce servir la population ? À Chartres même, en 2021, on est loin de l’idéal de la Commune : des services sociaux débordés, des personnes sans logis, des loyers trop chers qui chassent une partie de la population hors de la ville ; pas de conseils de quartier, sauf obligation légale ; des inégalités flagrantes dans le domaine de l’accès aux services publics. En revanche beaucoup d’argent pour les grands équipements et pour de grands spectacles au centre- ville.
Et pourtant la Commune fait aussi partie de l’histoire de Chartres. En 1871, parmi les 43 Chartrains communards fichés, beaucoup ont été arrêtés, jugés, déportés en Nouvelle Calédonie ou condamnés à mort. Une seule rue de Chartres porte le nom de l’un d’entre eux, Gustave Maroteau. Des richesses patrimoniales sur ce moment historique dorment dans les fonds des médiathèques. Aucune exposition n’est annoncée. Jean-Claude Farcy, ancien professeur à Chartres, spécialiste de la justice au XIXe siècle, a initié, avant de décéder en 2020, un travail sur la répression des Communards. Aucun hommage.
Les trois mois d’existence de la Commune de Paris, et des autres mouvements provinciaux, sont devenus une référence pour tous les mouvements de gauche, en France et dans le monde. La fête des travailleurs et des travailleuses, le 1er mai ou celle de la victoire des peuples contre les fascismes, le 8 mai, ne sont-elles pas porteuses des mêmes valeurs que la Commune ?
Jacqueline Marre jacqueline.marre@ville-chartres.fr
Boris Provost boris.provost@ville-chartres.fr