Après la Commune, juillet 1871

Après, une pre­mière chro­nique qui explique la genèse de cet évé­ne­ment, nous avons sui­vi les péri­pé­ties semaine après semaine. Depuis la 12ème chro­nique, nous sommes entrés dans l’Après Commune.

Nous nous pro­po­sons de conti­nuer à évo­quer dans les pro­chains mois les suites de cette révo­lu­tion vain­cue mais jusqu’à nous vivace dans les pen­sées de celles et ceux qui veulent chan­ger le monde.

Dans cette page, le mois de juillet 1871. En effet, les arres­ta­tions de Communards se pour­suivent jusqu’en juillet.

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Courses du 2 juillet 1871, par Bertall

Courses du 2 juillet 1871, par Bertall

 

Commune de Paris

Après la Commune, juillet 1871

 

Le 01 : Paul Verlaine, qui était char­gé de “faire une revue de presse” aux membres de la Commission exé­cu­tive de la Commune est révoqué.

Guignol illustré 9-11 juillet 1871 Loi sur les caricatures de presse

Guignol illus­tré 9–11 juillet 1871 Loi sur les cari­ca­tures de presse [BM de Lyon]

Le 02 : Élections légis­la­tives par­tielles : la majo­ri­té répu­bli­caine l’emporte dans le pays. À Paris, 16 des 21 sièges à pour­voir sont gagnés par les can­di­dats conser­va­teurs : seuls 5 can­di­dats répu­bli­cains dont Gambetta sont élus sur la liste radi­cale ; il y a 100 000 élec­teurs de moins qu’aux élec­tions du 8 février.

Le 06 : Loi sur les des­sins de presse : avant publi­ca­tion, ils doivent être sou­mis au Bureau de la presse pour auto­ri­sa­tion, et même à la Division de la sûre­té géné­rale du minis­tère de l’Intérieur, et aus­si à la per­sonne qu’ils sou­haitent cari­ca­tu­rer l’autorisation de repro­duire son por­trait. Cette dis­po­si­tion avait été sup­pri­mée le 4 sep­tembre 1870. Elle don­ne­ra lieu à 52 mesures admi­nis­tra­tives et 165 pour­suites judi­ciaires, entre juillet 1871 et mai 1873.

Le 08 : Arrestation de Théophile Ferré.

Le 09 : Arrestation du Chartrain Gustave Maroteau.  L’Union agri­cole d’Eure-et-Loir annonce son arres­ta­tion dans des termes au moins aus­si har­gneux que Le Journal de Chartres1.

Adrien Proust

Adrien Proust

Le 10 : Institution d’une Commission des grâces. Ses déli­bé­ra­tions témoi­gne­ront d’une indul­gence limi­tée, elle pren­dra par­fois l’avis de Thiers avant de se pro­non­cer sur cer­taines peines capi­tales. On l’appelle « Commission du coup de grâce », et plus sim­ple­ment « Commission des assassins ».

Naissance à Paris de Marcel, fils d’Adrien Proust natif d’Illiers, méde­cin à l’hôpital de la Charité qui n a pas hési­té à par­cou­rir la capi­tale au milieu des bom­bar­de­ments et des com­bats pour sau­ver des bles­sés. Éminent hygié­niste, savant spé­cia­liste des vagues épi­dé­miques et grand voya­geur, le doc­teur Proust est l’un des pion­niers de la dis­tan­cia­tion sociale, de la qua­ran­taine, du cor­don sani­taire moderne et du confi­ne­ment, qu’il appe­lait « séques­tra­tion ».  Le rap­port de la com­mu­nau­té médi­cale est una­nime : les méde­cins res­tés à Paris comme lui, et ils furent nom­breux, ont tout sim­ple­ment res­pec­té leur serment.

Le 15 : L’état de siège à Paris et dans 42 autres dépar­te­ments ins­tau­ré depuis août 1870, est pro­lon­gé jusqu’en 1876 : fer­me­ture des clubs, inter­dic­tion de réunion… Ainsi dans le Limousin, outre Limoges, plu­sieurs villes qui ont mani­fes­té leur sym­pa­thie pour la Commune de Paris (Tulle, Saint-Junien, Solignac, Aubusson, La Souterraine, Saint-Léonard-de-Noblat) sont mises en état de siège, et les conseils muni­ci­paux dissous.

Eugène Razoua

Eugène Razoua

Le 17 : Eugène Razoua, com­man­dant de l’École mili­taire sous la Commune, est arrê­té au café du Nord à Genève par la police hel­vé­tique. Il sera relâ­ché six semaines plus tard, sous la pres­sion notam­ment de la presse défen­dant le droit d’asile et le gou­ver­ne­ment fran­çais n’ayant pu prou­ver qu’il était « un pillard, un assas­sin, un incen­diaire ». La Suisse devient alors un asile sûr.

Le 22 : Jules Claretie, dans L’Illustration : « Ruiné, incen­dié, et dévas­té, l’Hôtel de Ville reste du moins la plus superbe des ruines pari­siennes. Son har­mo­nie pri­mi­tive a fait place à un pit­to­resque et funèbre désordre qui serre le cœur, tout en offrant aux yeux un de ces spec­tacles hor­ri­ble­ment beaux que gardent de tels écrou­le­ments. […] Épouvante, est-ce bien le sen­ti­ment qu’on éprouve? Non : le sen­ti­ment artis­tique est si puis­sant, le désastre a fait de ces choses somp­tueuses des choses si belles, qu’on s’arrête et qu’on admire. » 

Voeu national

Vœu natio­nal [BnF, Gallica]

Le 30 : Aux élec­tions muni­ci­pales, seuls les maires d’ar­ron­dis­se­ment pari­sien sont élus pour une durée de trois ans, confor­mé­ment à la loi du 14 avril 1871. La liste d’union répu­bli­caine conduite par Clemenceau l’emporte et com­prend 3 ex-membres de la Commune : Armand Jobbé-Duval, Henri Marmottan et Arthur Ranc qui sera condam­né par contu­mace le 13 octobre 1873 à la peine de mort. Également élu, Édouard Simon, arrê­té à Vanves en avril, empri­son­né à Versailles et à Chartres jusqu’en juin comme com­plice des Communards. Pendant ce temps, il a rédi­gé un ouvrage dans lequel il excuse les insur­gés pari­siens en accu­sant les Versaillais d’avoir déli­bé­ré­ment pro­vo­qué l’affrontement.

Depuis son retour le 15 juin et jusqu’en 1885, Clemenceau tient, 23 rue des Trois-Frères, un dis­pen­saire où il soigne gra­tui­te­ment les déshérités.

Le ‘’Vœu natio­nal’’ (confré­rie patrio­tique et spi­ri­tuelle) de deux catho­liques conser­va­teurs, le phi­lan­thrope Alexandre Legentil et le peintre Hubert Rohault de Fleury, ren­contre un vif suc­cès : construc­tion à Paris d’une église consa­crée au Cœur du Christ, en répa­ra­tion des ‘’péchés’’ com­mis par la France : mul­tiples attaques menées contre la reli­gion depuis la Révolution de 1789 jus­qu’à la Commune de Paris. Pour eux, la défaite contre l’en­ne­mi d’outre-Rhin, le ter­rible siège de Paris et les morts de la Commune sont une puni­tion céleste, il convient de faire œuvre de pié­té pour obte­nir le par­don divin.

Le 31 : La France effec­tue un pre­mier ver­se­ment (500 mil­lions de francs) de l’in­dem­ni­té de guerre : l’ar­mée alle­mande éva­cue la Normandie. Il faut aus­si payer 1 mil­lion par jour pour les frais d’entretien des troupes d’occupation. Un pre­mier emprunt (à 5%) émis début juillet pour un mon­tant de 2 mil­liards a été sous­crit en cette jour­née (300 000 sous­crip­teurs pro­posent 5 mil­liards) démon­trant l’en­ri­chis­se­ment du pays sous le Second Empire et la confiance des Français et des milieux d’affaires.

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  1. Roger Joly, « La Commune de 1871, ses inci­dences char­traines », Bulletin de la Société archéo­lo­gique d’Eure-et-Loir. Mémoires, 3e tri­mestre 1970, tome 25, 114e année, n° 38, p. 192–201.