Après la Commune, novembre 1871
Après, une première chronique qui explique la genèse de cet événement, nous avons suivi les péripéties semaine après semaine. Depuis la 12ème chronique, nous sommes entrés dans l’Après Commune.
Nous nous proposons de continuer à évoquer dans les prochains mois les suites de cette révolution vaincue mais jusqu’à nous vivace dans les pensées de celles et ceux qui veulent changer le monde.
Le mois d’août à l’actualité moins chargée nous donne la possibilité de rattraper notre retard. Voici le mois de novembre 1871, durant lequel Chartres est le siège de procès de Communards.
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Commune de Paris
Après la Commune, novembre 1871
Octobre à décembre 1871
L’activité des conseils de guerre sera particulièrement intense au dernier trimestre de 1871 et durant les deux premiers de l’année suivante. Près de 50 000 décisions de justice, 93 condamnations à mort, 251 travaux forcés, 1 169 déportations en enceinte fortifiée, 3 417 à la déportation simple, 1 247 à la réclusion à perpétuité, 3 359 à des peines de prison, sans oublier 3 313 condamnations par contumace, 2 445 acquittements et 22 727 ordonnances de non-lieux, représentant 70 % du total : par « respect des règles du droit et volonté de distinguer ceux qui ont vraiment participé à l’aventure communarde des « autres ». Nulle douceur dans tout cela, mais contrainte par l’engorgement des lieux de détention où des personnes déclarées étrangères aux faits ou innocentes ont subi de longs séjours de plusieurs mois dans des conditions terrible ».
Retrouvez ici la chronique d’octobre 1871.
Novembre
Le 01 : Au Père-Lachaise, dès la Toussaint 1871, des bouquets anonymes commencent à fleurir discrètement les lieux.
Le 03 : Sur les 26 conseils de guerre qui siègent, 2 se tiennent à Chartres jusqu’au 31/07/72. Sur les 751 personnes qui vont y comparaître, 627 seront condamnées dont 44 femmes. Les jugements y seront particulièrement sévères tant par la quantité que le degré des condamnations1. « Parmi les condamnés, cinq d’entre eux avaient une profession libérale, deux étaient chefs d’entreprise, 17 étaient des employé&s de bureau ou d’administration, la grande majorité, 465, étaient des ouvriers, pour un tiers environ du bâtiment. »2
Le 15 : Élisée Reclus est condamné par le 7e conseil de guerre, à la déportation simple après avoir affirmé son socialisme. Depuis son arrestation le 4 avril, il est passé par Satory, les pontons de Brest, par 14 prisons différentes. Une démarche des savants anglais aboutira, le 3 février 1872, à la commutation de sa peine en dix années de bannissement. Élisée Reclus se refusera toujours à signer un recours en grâce.
Le 18 : Au procès de Rodez, 9 condamnations à mort, commuées en travaux forcés à perpétuité. Ceux qui se présentent sont acquittés, dont Émile Digeon, car, même les témoins à charge, tels les otages, présentèrent Digeon comme « un homme de cœur ».
Le 21 : Premier départ pour la Nouvelle-Calédonie depuis Toulon, sur le bateau Le Jura. 20 convois se succèderont jusqu’en 1878, transportant un peu plus de 3 800 personnes, dans des conditions déplorables. Beaucoup meurent pendant ce voyage qui dure de 100 à 150 jours. Les condamnés à la déportation simple vont à l’île des Pins ou à Nouméa (les « simples »), ceux condamnés à subir leur peine en enceinte fortifiée à la presqu’île Ducos (les « blindés »). Quant à ceux condamnés aux travaux forcés à temps ou à perpétuité, ils purgent leur peine au bagne de l’île de Nou et doivent travailler à des travaux pénibles huit heures par jour : terrassements, exploitation de carrières, déchargement des navires. Les châtiments corporels sont cruels, la discipline impitoyable. L’isolement, les privations font leur œuvre ; il y a des cas de folie. Les condamnés de droit commun sont mieux traités que les communards.
Le 28 : Exécution au camp de Satory de Rossel, Ferré et Bourgeois. Louise Michel assiste aux exécutions et voit mourir ses amis, parmi lesquels son cher Théophile Ferré, auquel elle fait parvenir un poème d’adieu : Les Œillets rouges.
Bazaine, Dreyfus, et Rossel, ancien Ministre délégué à la Guerre, sont les seuls officiers poursuivis sous la IIIème République et Rossel le seul condamné à la peine de mort. Le Gouvernement accorde difficilement une faveur à la famille de Louis Rossel : après embaumement de son corps à l’hôpital militaire (Grand Commun), il a été rendu à son père pour être inhumé à Nîmes.
Le 30 : Gaston Crémieux, chef modéré de la Commune de Marseille, est fusillé à 7 heures du matin. Après six mois d’emprisonnement, il est le seul des chefs insurgés à qui Thiers a refusé la grâce.
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- Dossier d’un condamné à mort (Affaire Maroteau) / annotations de Me Léon Bigot, avocat ; lettre-préface de Victor Hugo, Edité par A. Chevalier (Paris), 1871.
- La Commune de 1871, ses incidences chartraines, Joly Roger, Société Archéologique d’Eure-et-Loir, 1970, p. 199.